Le concept de blessure est beaucoup utilisé dans le domaine du développement personnel ou spirituel. Alors avant d’aller plus loin, j’aimerais préciser de quoi je parle ici quand je parle de blessure !
Le Larousse distingue les blessures physiques des blessures psychiques :
1. Lésion produite en un point quelconque du corps par un choc, un coup, une arme ou un corps dur quelconque.
2. Atteinte morale profonde et douloureuse ; offense : Une blessure d’amour-propre.
Autant la blessure physique peut être qualifiée avec objectivité (taille et profondeur de la plaie, type de tissus atteints…), autant la blessure psychique est hautement subjective.
Bien plus que des circonstances et des faits, elle dépend des émotions ressenties, de ce qu’on s’est raconté sur ce qui s’est passé, des déductions qu’on en a faites sur soi, sur les autres, sur le monde.
C’est notre réaction aux événements qui donne corps à la blessure, et non les événements eux-mêmes !
3 critères pour reconnaître une blessure
Dans une situation donnée, vous avez une réaction émotionnelle :
- sur laquelle vous n’avez pas la main (vous ne pouvez pas prendre sur vous)
- de grande intensité : la réaction peut sembler disproportionnée par rapport au stimulus (vous perdez tous vos moyens, vous êtes emporté-e par la colère…)
- il y a un phénomène de répétition. Vous avez l’impression de revivre la même chose sur les mêmes rails, « d’attirer » encore et encore les mêmes situations, les mêmes personnes… et d’y réagir avec la même intensité, quoi que vous tentiez pour changer la donne.
Tous-tes blessé-es ?
Dès lors qu’on est vivant et humain, la vie nous met d’une façon ou d’une autre au contact de vécus à potentielle charge traumatique :
- accident
- expériences difficiles à l’école
- séparation des parents
- décès d’un proche ou d’un animal
- ….
Certains de ces événements laisseront des cicatrices à certain-es, pas à d’autres.
Le fait que les cicatrices soient plus ou moins profondes, et le degré avec lequel elles affectent le présent de chacun-e, a beaucoup à voir avec la stabilité du socle qui était là avant l’impact.
Et ce socle, il se construit très tôt dans la vie.
C’est souvent dans l’enfance que se forment le plus de blessures.
Pourquoi ?
Parce que l’enfant est hautement vulnérable, hautement immature émotionnellement, et hautement dépendant d’un adulte pour lui apporter le contenant, l’accueil à ses émotions et la régulation à son système nerveux.
Si vous aviez des fondations solides. Si votre entourage était constitué d’adultes ressources, sécurisants, qui savaient vous rejoindre dans ce que vous viviez, alors vous avez pu immédiatement après les vécus à potentiel traumatique, réguler ce qui venait de se passer et le transformer plus vite. Et retourner dans la vie, dans le présent.
Si au contraire, vous étiez entouré-e d’adultes immatures, insécures, jugeants, intrusifs (sans leur jeter la pierre à eux), et que vous n’avez pas été rassuré-e, reçu-e dans vos vécus de peur ou de choc, alors les fondations seront peu favorables à se remettre d’un moment traumatique. Elles seront même propices à une blessure en creux, de longue durée (avec par exemple une carence affective, un manque de sécurité intérieure….)
Le trauma et ses ramifications
La blessure initiale va former une zone de vulnérabilité, de sensibilité et d’hyperréactivité, sur laquelle des schémas de fonctionnement vont se forger.
Imaginons qu’un enseignant maladroit a moqué votre rédaction de CE2 devant toute la classe. Vous en avez ressenti une humiliation, une honte profonde. Vous avez développé, par extension, un auto-dénigrement sur vos capacités d’écriture (alors que vous aimiez ça à la base).
Et un beau jour, à 32 ans, vous vous retrouvez bloqué-e quand on vous demande de rédiger une page de présentation d’un projet. Vous n’avez même plus le souvenir conscient de l’épisode de CE2. Vous ne faites pas le lien.
Mais une part de vous cherche à vous protéger de revivre l’humiliation ressentie à 8 ans, et met en place forces stratégies inconscientes pour cela.
Cela semble une fatalité ? Pourtant ça ne l’est pas.
On peut apporter de l’apaisement à nos zones blessées.
On peut s’alléger durablement !
Comment ?
En thérapie, on part de ce qui nous embête ou nous fait souffrir au présent, on explore les ressentis, et par des questions délicates, non-intrusives, on se met en quête de la blessure d’origine, pour rencontrer celui ou celle en nous qui l’a vécue.
On aide l’enfant de CE2 qu’on était à mettre des mots sur ses ressentis, à les intégrer, leur laisser prendre leur place dans le corps.
Faire circuler ce qui s’était figé. Intégrer ce qui s’était coupé. Mettre des mots là où on en a manqué.
Accueillir là où les affects avaient été mis sous un couvercle.
Reconnaître ce qui avait été nié.
Ainsi la blessure peut cicatriser, devenir moins sensible, et nous permettre de vivre notre présent sans être gouverné-e par notre passé !